Un petit groupe de scientifiques à travers les États-Unis tentent de créer des embryons à la fois humains et animaux, autrement connus sous le nom de chimères.
Chimère est un terme désignant une créature grecque mythique composée d'une partie de lion, d'une partie de chèvre et d'une partie de serpent. Dans les temps modernes, le terme a été utilisé pour décrire un seul organisme composé de cellules de différents zygotes.
Le National Institutes of Health (NIH = "Instituts Nationaux de la Santé") a réduit le financement de ce type de recherche, au moins temporairement, en septembre dernier. Les responsables des NIH ont déclaré qu'ils devaient examiner les implications scientifiques et éthiques de cette technologie avant d'aller de l'avant.
Les expériences consistent à insérer des cellules souches humaines dans des embryons en plein essor d'autres espèces, engendrant ainsi des chimères. En réalité, les chercheurs créent des chimères humaines, au moins en partie, depuis des années. Par exemple, les scientifiques étudient déjà des rats atteints de tumeurs humaines pour mieux comprendre le cancer.
Ce qui rend la recherche récente unique, c'est qu'elle impliquerait l'insertion de cellules souches humaines dans les embryons d'animaux non humains au cours des premiers stades du développement embryonnaire.
"Le problème particulier ici avec les cellules souches est que ces types de cellules humaines sont si puissantes et si élastiques qu'il y a une grande inquiétude quant à la mesure dans laquelle les animaux pourraient devenir humanisés", a expliqué Insoo Hyun, bioéthicien à la Case Western Reserve University, dans un article pour NPR.
La motivation derrière la recherche est de produire des chimères qui pourraient ouvrir la voie à de nouvelles options de traitement pour les maladies humaines. Par exemple, les scientifiques pourraient utiliser la technologie pour développer des modèles animaux plus efficaces tout en étudiant des maladies en laboratoire.
Néanmoins, les chimères embryonnaires sont une question controversée, qui suscite une foule de préoccupations biologiques et morales. Selon Françoise Baylis, bioéthicienne à l'Université Dalhousie en Nouvelle-Écosse, au Canada, créer des créatures qui sont en partie humaines et en partie animales est une erreur car cela « introduirait une confusion morale inexorable dans nos relations existantes avec les animaux non humains, et dans nos relations futures avec des hybrides et des chimères en partie humains. »
La raison pour laquelle les chimères sont un sujet si controversé est que nous traitons les humains différemment des animaux non humains. Bien que nous fassions nous aussi partie de la toile de la nature et que nous devions agir en conséquence, ce qui rend les humains uniques, c'est que nous sommes des agents moraux. Chaque fois qu'un lion attrape et mange une gazelle, il n'assassine pas la gazelle, il tue la gazelle. Cependant, en créant des créatures qui sont en partie humaines et en partie non humaines, la ligne de démarcation morale entre les deux espèces est floue.
Un autre problème avec les chimères est que les cellules humaines pourraient se retrouver dans le cerveau des animaux. Les chimères pourraient devenir trop humaines, possédant peut-être des capacités mentales humaines. Bien que la probabilité qu'un animal acquière une conscience au même titre que les humains soit faible, c'est une possibilité qui ne peut être balayée sous le tapis.
"Nous ne sommes pas près de l'île du Dr Moreau, mais la science évolue rapidement", a déclaré l'éthicien du NIH David Resnik lors d'une réunion dans le Maryland. "Le spectre d'une souris intelligente coincée dans un laboratoire quelque part en train de crier "Je veux sortir" serait très troublant pour les gens", a-t-il ajouté.
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